Kaboul envoyée spéciale
Tout le monde le dit. Le répète. Vous voulez l'entendre encore? «C'est la liberté à Kaboul.» Ce samedi, une cérémonie officielle intronisera le gouvernement de transition constitué sous l'égide des Nations unies à Bonn le mois dernier, marquant solennellement la fin du régime taliban. Mais, à la veille de la fête, la capitale parle de sa joie avec un regard grave et de sa liberté avec un air traqué. «Cela fait vingt-deux ans que nous sommes dans l'obscurité des guerres. Nos yeux ne sont plus accoutumés au visage de la paix. Est-ce bien le sien?», explique Hamid Wadi, un docteur. Il n'est pas sûr d'aller à la cérémonie. «Nous ne savons même pas si la population sera autorisée à s'approcher du centre.» Alors, samedi, Wadi a prévu «de se disputer avec [sa] femme et [ses] filles». «Comme d'habitude, depuis que les talibans sont partis: elles veulent voir une vidéo romantique indienne et moi Jean-Claude Vandamme. Pendant cinq ans, c'était interdit. Et moi, je n'irai tranquillement dans le centre de Kaboul que quand il y aura au moins 5 000 soldats internationaux dans les rues.»
Car, davantage que les nouvelles autorités politiques, c'est l'arrivée de la force multinationale, dont le principe fut également établi à Bonn, que guette la capitale. «Quand les mollahs se sont enfuis, nous nous sommes sentis vraiment délivrés. Mais heureux, je ne le dirais pas. Les moudjahidin de l'Alliance du Nord qui ont pris possession de la ville, nous les connaissons: ce sont