Freetown envoyée spéciale
Après dix années de guerre civile et quelques mois de paix, Freetown tente de rafistoler ses morceaux. Vue de l'hélicoptère qui survole le bras de mer entre l'aéroport et la péninsule d'Aberdeen, la capitale sierra-léonaise ressemble à une carte postale: blanche, cernée de collines verdoyantes, bordée d'une mer émeraude où les plages dessinent de petites auréoles d'un jaune très pâle. A cette faible altitude, on distingue les rectangles turquoise des piscines, les cocotiers, les baigneurs. Une fois à terre, l'image de rêve disparaît.
Trois bennes. Les palaces défraîchis n'ont pas l'eau et l'électricité tous les jours. Les ordures s'accumulent dans les rues. Il n'y a que trois bennes pour une population passée, en dix ans, de 1,5 million à plus de 3 millions d'habitants. La coopération britannique en a promis trois autres et la ville négocie un prêt avec la Banque mondiale pour s'équiper d'un camion pour le transport de la viande. «Il y a un fossé énorme entre les attentes et les services que nous sommes en mesure de fournir», admet le maire Henry Fergusson, perché dans un bureau qui donne sur le port.
Au centre-ville engorgé par les voitures, des restes noircis d'immeubles sans toit ni fenêtres sont autant de cicatrices de la prise de la ville par les rebelles du Front révolutionnaire uni (le RUF en anglais), le 6 janvier 1999. Un massacre. «Ils ont mis le feu partout où régnait la corruption du gouvernement, raconte un habitant, le quartier général de