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Libération

«La seule issue à la crise argentine, c'est l'aéroport»

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Une nuit avec des Argentins, ruinés par la crise, qui campent devant les consulats européens dans l'espoir d'un visa pour une vie meilleure.
publié le 25 janvier 2002 à 21h47

Buenos Aires

de notre correspondant

Une heure du matin. Nuit d'été austral, humide, poisseuse. Sur le trottoir, au pied des immeubles cossus de Barrio Norte, quartier élégant de la capitale, ils sont plus de cent. Des jeunes. Des vieux, aussi. Beaucoup d'entre eux dorment, recroquevillés sur une couverture, un carton, un sac de couchage. Ou calés dans l'une de ces chaises longues que l'on déploie d'ordinaire sur la plage. Les autres murmurent pour ne pas les réveiller. Ou fument en silence en imaginant l'avenir.

Dans cette queue, devant la porte sombre du consulat d'Espagne, la plupart sont candidats à l'exil. D'autres sont venus réclamer la nationalité qui se transmet de père en fils comme un sauf-conduit face aux infortunes de l'histoire. Jadis, pour fuir les purges du péronisme, les assassins de la dictature, l'hyper inflation. Aujourd'hui, pour échapper au chômage. Assis en tailleur à l'angle de la rue patiente un groupe de jeunes, unis par la même désillusion sur leur pays. Par le même espoir de réussir ailleurs. Et par le rituel du maté, l'infusion locale, qui circule de main en main.

Selon certaines sources, un million de personnes auraient quitté l'Argentine depuis le milieu des années 90. Ces deux dernières années, 250 000 personnes sont parties. Les attentats du 11 septembre aux Etats-Unis avaient freiné l'exode, mais il a repris de plus belle avec la crise économique. Aujourd'hui, des files se forment devant le consulat de Pologne, pays promis à une prochaine adhésion