Pékin de notre correspondant
«Il est temps que l'Assemblée nationale populaire cesse d'être un repaire de retraités et qu'elle représente réellement les intérêts des gens, en particulier des paysans.» L'homme qui s'exprime aussi violemment au coeur de Pékin n'a rien d'un dissident clandestin : Hu Angang est un économiste respecté, directeur du très officiel Centre pour les études chinoises, patronné par l'Académie des sciences sociales et l'université de Qinghua. Il a fait connaître ses opinions peu orthodoxes dans deux textes publiés la semaine dernière par son institut et communiqués aux plus hautes instances du pouvoir communiste.
«Trou noir». Dans une interview à Libération hier, tout en jetant un coup d'oeil au téléviseur qui retransmettait le discours du Premier ministre Zhu Rongji à l'ouverture de la session annuelle du Parlement, Hu Angang a tiré la sonnette d'alarme face à «l'instabilité sociale qui se cache derrière la prospérité économique de la Chine». Une instabilité qui, selon lui, ira croissant si un changement de cap brutal n'est pas opéré. Au coeur de ses préoccupations, comme de celles de la majorité des Chinois, selon des études d'opinion réalisées par son institut : le «trou noir» de la corruption, le décalage croissant entre les villes et les campagnes et le «déluge du chômage urbain».
Cet économiste de 48 ans, en partie formé aux Etats-Unis, n'est pas homme à parler à la légère : il avance une avalanche de statistiques pour appuyer son propos. Nul n'a cont