Menu
Libération
TRIBUNE

L'Inde et le poison de la religion

Article réservé aux abonnés
Les récents affrontements entre hindous et musulmans révèlent bien plus que les limites et les errements de l'action politique.
publié le 18 mars 2002 à 22h37

Une image m'a particulièrement marqué cette semaine: celle du bras carbonisé d'un jeune enfant, son petit poing saillant des restes d'un bûcher humain, à Ahmedabad, dans la région de Gujarat, en Inde. Les crimes d'enfants sont une sorte de spécialité en Inde. L'assassinat routinier, quotidien, des bébés filles indésirables..., le massacre d'innocents à Assam, dans les années 1980, lorsqu'un village s'était retourné contre le village voisin, celui d'enfants sikhs à Delhi, durant l'horrible vague de représailles qui a fait suite à l'assassinat d'Indira Gandhi. Autant d'événements qui témoignent de ce don particulier qui est le nôtre, plus flagrant encore, en ces temps de troubles religieux: la faculté d'asperger nos enfants de kérosène avant d'y mettre le feu, de leur trancher la gorge, de les étouffer ou tout simplement de les battre à mort à l'aide d'un solide morceau de bois.

Je dis «nous», car c'est ici l'homme né et éduqué en Inde qui s'exprime, profondément attaché à son pays, et qui sait que ce que l'un d'entre nous accomplit aujourd'hui d'autres sont potentiellement capables de l'accomplir demain. Si je tire une certaine fierté des atouts qui font la force de l'Inde, je dois, au même titre, prendre à mon compte ses péchés.

J'ai l'air d'un homme en colère? Tant mieux. Honteux et dégoûté? Eh bien, oui. Car, tandis que l'Inde subit les combats entre hindous et musulmans, les plus sanguinaires qu'elle ait connus depuis plus de dix ans, rares sont ceux qui osent clamer haut e