Kenema envoyée spéciale
A dix minutes de route de Kenema, la ville des marchands de diamants dans l'est de la Sierra Leone, quelque 16 000 personnes, réfugiées dans leur propre pays, s'entassent dans le «camp des Libanais». Une véritable petite ville, avec son marché, son dispensaire, son comité de camp et ses notables, une école. Comme partout, des cases en terre couvertes de palmes, rafistolées de bâches blanches en plastique des Nations unies. Les femmes préparent à manger dans des marmites d'aluminium. Par terre, des petits tas de bois ramassés dans la forêt toute proche, que l'on vend pour améliorer l'ordinaire : une ration calibrée, composée de boulgour, d'huile et de lentilles (1). Une fois par mois, la nourriture, «don de la communauté internationale», arrive dans ce camp ouvert en 1998 par le gouvernement. Formellement il est placé sous la tutelle de l'Unocha, agence des Nations unies s'occupant des déplacés dans leur propre pays, à la différence du HCR, en charge des réfugiés.
Vendre son corps. «Le problème c'est que tout le monde se bat pour la petite aide qu'il reçoit», résume un habitant. En Sierra Leone, l'urgence dure depuis le début de la guerre civile, il y a onze ans. Au fil des années, le provisoire a pris les allures d'un système parfois féroce pour les plus faibles. Pour les femmes et les jeunes filles, cela peut vouloir dire vendre son corps à ceux qui sont venus les «aider». Aminata, 25 ans, rajuste son foulard sur ses cheveux et raconte comment elle a s