Le Caire de notre correspondante
Il a de longs cils et un sourire timide, à peine 20 ans, peu de copains et des t-shirts moulants. Quand Yasser répond au téléphone, il y a toujours de l'inquiétude dans sa voix. Surveiller ses paroles, éviter de prononcer des noms, ne pas parler de «l'affaire». Celle du Queen Boat, ce bateau-discothèque amarré au centre du Caire, où 52 présumés homosexuels ont été arrêtés l'an dernier ; vingt-trois ont été condamnés à des peines allant d'un à cinq ans de prison, pour «débauche» ou «mépris de la religion».ÊParano, Yasser ? Peut-être. Mais les faits sont là : depuis bientôt deux ans, le gouvernement égyptien a lancé la chasse aux sorcières. Descentes de police dans les bars à forte fréquentation homosexuelle, contrôles d'identité multipliés aux abords des lieux de drague, arrestations, procès. Dernier en date : celui de cinq hommes originaires de Damanhour, dans le delta du Nil, accusés de débauche et de prostitution. Ils ont été condamnés à trois ans de prison. En moins de deux ans, plusieurs centaines de personnes auraient ainsi été arrêtées, dont 25 début avril.
Internet. «Au départ, ce n'était pas vraiment une campagne antihomos, minimise un diplomate occidental. Les gays étaient devenus trop visibles pour les moeurs égyptiennes. L'Egypte tolérait les homos, tant qu'on ne les voyait pas.» Une visibilité toute relative. «On a commencé à voir de plus en plus de petits groupes de jeunes, habillés très mode et avec des comportements un peu effémi