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Libération

A Alger, la casbah si loin des urnes

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Dans ce quartier à l'abandon, la survie passe avant les législatives.
publié le 29 mai 2002 à 23h37

Alger envoyée spéciale

Tout le monde dort sauf la mère. A Alger, dans la Casbah comme ailleurs, l'eau ne coule plus, au mieux, qu'une demi-heure tous les trois jours, après minuit. En cette période de campagne électorale, un responsable de la willaya (préfecture) s'est fâché quand quelqu'un a évoqué les défaillances du système d'assainissement l'autre matin. «Mais il marche. Ce sont les gens qui dorment.» Alors, pour ne pas rater le précieux filet, la mère reste éveillée dans la petite réserve d'eau à côté de l'unique robinet, au 4, rue Saïd-Kadi, dans la Casbah.

Il était presque une heure du matin quand la maison s'est effondrée. Dans l'autre pièce, le père et le fils sont morts sur le coup. Les voisins se précipitent. Ensevelie sous des masses de décombres, la mère respire encore. Elle parle. S'inquiète du père, du fils. Les hommes essayent de déblayer les gravats. Les pompiers ont été appelés, mais les heures passent. «Elle ne poussait plus qu'un petit cri de temps en temps. Elle a demandé de l'eau. Comme pas une goutte n'avait coulé ce soir-là, nous avons eu du mal à en trouver», raconte un voisin. Quand les pompiers sont arrivés vers 6 heures du matin, la mère venait de mourir, étouffée. Pour creuser, «ils n'avaient que leurs mains nues», dit le responsable d'une association. Les élections législatives de jeudi ? «Ça, c'est dans l'autre monde, leur monde à eux. Dans le nôtre, on meurt comme des chiens.»

Quand on regarde Alger, la Casbah est invisible, cachée dans les repli