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Libération
Interview

L'intégration ne devrait pas être un abandon de la culture d'origine

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Marie-Rose Moro: ethno-psychiatre, soigne les enfants de migrants.
publié le 1er juin 2002 à 23h48

Dans Enfants d'ici venus d'ailleurs, vous expliquez que l'intégration telle que la pensent les politiques et les institutions a vécu. Pourquoi ?

Les hommes politiques, les institutions scolaires, médicales, judiciaires, continuent de penser l'intégration des migrants comme un abandon de leur culture d'origine pour accéder à ce qui serait l'identité française. Or cette acculturation est souvent meurtrière : elle peut se traduire chez les enfants de migrants par des violences, des replis identitaires ou religieux, totalement surprenants pour les parents eux-mêmes qui se sont résolus à abraser leurs différences. Mon hypothèse est qu'aujourd'hui l'adhésion au principe républicain ne peut plus être un effacement de l'identité d'origine, mais un métissage. Sinon, non seulement la société perd une richesse possible à refuser la différence mais, de plus, elle prend le risque d'être fragilisée et menacée. C'est étonnant à quel point le discours sécuritaire si massif et si univoque des hommes politiques apparaît comme une réponse simpliste à des questions qu'on n'ose pas poser. On nous dit qu'il faut plus de police et de répression. Sans analyse des raisons pour lesquelles le lien social est soudain si précaire. Il est en effet urgent de refonder la cité sur des principes modernes et pluriels, adaptés à la réalité actuelle de nos sociétés.

Les enfants de migrants et, d'une manière générale, tous ceux qui sont confrontés à une multiplicité d'appartenances préfigurent cette modernité dans