Londres de notre correspondant
Un bruit feutré s'élève du bar. Des portraits ornent des pièces tapissées de velours. Un même costume noir habille maîtres et serviteurs. Le White's «a moins évolué que la plupart des autres clubs de Londres», se félicite son chroniqueur et l'un de ses plus anciens habitués, Anthony Lejeune (1). Un doux euphémisme. Le cercle le plus vieux et le plus sélect de Londres est plus que jamais figé dans ses traditions même les plus obscures. Depuis toujours, ceux qui frappent à sa porte doivent remplir une condition essentielle : être de sexe masculin.
Liftings. En trois cents ans d'existence, l'immeuble de Saint James' Street a bien subi quelques liftings. Durant les années folles, la création d'un bar américain a provoqué un petit séisme. En 1960, un poste de télévision est apparu pour suivre les matchs de cricket. Des excentriques, des manants et même un ou deux assassins ont figuré parmi ses membres aux côtés du duc de Wellington, de Beau Brummell ou d'Evelyn Waugh. Mais la question d'admettre ou non les femmes ne s'est jamais posée. Leurs seules représentantes portent le tablier.
«Où les mettrait-on ? L'endroit est trop petit, s'exclame Anthony Lejeune. Et, dès qu'elles surgissent quelque part, le niveau sonore augmente. Vous n'avez pas la même ambiance quand l'assistance est masculine.» Pour expliquer cet ostracisme, il invoque des raisons économiques. «Avec des femmes, un club perd de l'argent. Elles ne boivent pas assez», dit-il devant un verre d