Karaboulakh, Ingouchie
envoyée spéciale
La route qui mène de l'aéroport à la capitale ingouche, Nazran, est sans doute la meilleure du pays. Fraîchement asphaltée, bordée d'arbres, elle est un îlot de modernité dans cette république du Caucase russe où les villages ne sont accessibles que par de méchants chemins de terre. C'est sur cette route, près de Karaboulakh, que, dans la nuit du 6 juin, trois policiers ingouches ont été abattus par des bandits. L'incident aurait été un crime ordinaire si la voiture abandonnée par les meurtriers n'avait porté une plaque d'immatriculation tchétchène et si un chien policier n'avait, à point nommé, conduit les enquêteurs vers une vieille ferme kolkhozienne toute proche. Transformée en camp de réfugiés, elle abrite depuis trois ans environ 2 000 Tchétchènes déplacés par le conflit qui déchire leur petite république. Les réfugiés, abrités sous des tentes et d'anciennes étables, sont toujours sous le choc de cette nuit-là. «C'était la première fois, raconte le vieux Shirvan Halimov, que des policiers venaient la nuit. Ils sont arrivés masqués, en tenue de camouflage, avec des chiens. Ils ont encerclé le camp, et rattrapé les jeunes qui essayaient de sortir. Cela a duré jusqu'à 3 heures du matin. Des femmes se sont évanouies car cela réveillait les souvenirs des opérations de nettoyage en Tchétchénie. Personne n'osait sortir, car ceux qui l'avaient fait avaient reçu des coups de crosse. Le lendemain, ils sont revenus perquisitionner, en douceur