La Haye envoyé spécial
Serré dans un impeccable costume bleu, Radomir Markovic est grand, massif, avec des mains comme des battoirs.ÊPolicier ambitieux et sans scrupule, il est devenu en 1998 le patron de la Sécurité d'Etat de Serbie (DB) par la grâce de la famille Milosevic. Il dépose d'une voix mécanique, sans jamais jeter un regard vers l'ex-président yougoslave assis de l'autre coté de la grande salle d'audience du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPI). Le visage fermé, Slobodan Milosevic affiche un ostensible ennui, feignant même par moment de s'assoupir, comme pour souligner à l'avance l'inintérêt des propos de son ancien protégé.
Initié. Ce face-à-face s'annonce pourtant décisif. Jamais depuis le 12 février, début du procès de l'ancien homme fort de Belgrade, jugé pour 66 chefs d'inculpation dont crimes de guerre, crimes contre l'humanité et génocide pour la Bosnie un aussi important «initié» à même de raconter de l'intérieur les rouages du système n'était venu déposer à la barre. La veille, il avait brièvement expliqué que l'accusé était le patron de la chaîne de commandement pour les opérations au Kosovo. Hier, en répondant aux questions du représentant du procureur Geofffrey Nice, l'ex-chef de la police secrète a expliqué la réalité du pouvoir de Milosevic sur les services de sécurité. Ce dernier était informé de tout «et recevait des rapports quotidiens». Il décidait. Il payait. Et il avait un rôle direct dans des opérations financières occult