Christine Messiant, chercheuse au Centre d'étu des africaines de l'Ecole des hautes études en sciences sociales (Ehess), est la meil leure spécialiste de l'Angola en France.
L'Angola traverse une terrible crise humanitaire. Quel a été l'enchaînement fatal ?
Il faut distinguer trois crises aujourd'hui. Il y a une très grave crise humanitaire, généralisée, qui est le produit d'une guerre menée sans considération pour la population, prise en otage et instrumentalisée par les deux camps : un tiers de la population est déplacée, un quart seulement de ce tiers reçoit une aide humanitaire. Il y a ensuite la tragédie des «zones grises», que MSF a découverte : des milliers de personnes hagardes et squelettiques, qui, à Bunjei (au sud de Huambo) par exemple, ont été rassemblées autour d'une base militaire, à partir de l'automne 2001, par l'armée angolaise pour venir à bout de l'Unita. C'est un crime de guerre qui vient après d'autres, commis des deux côtés. La communauté internationale, qui n'a apporté d'aide que du côté gouvernemental, porte une responsabilité écrasante. La troisième crise a lieu dans les zones de cantonnement des soldats de l'Unita et de leurs familles. Ils y sont arrivés dans des conditions physiques abominables. Malades, affamés, ils ont continué à y mourir. Pour des raisons politiques, les camps avaient été fermés à tout «intervenant» extérieur, le gouvernement entendant garder le contrôle, sans aucune interférence, de leur démilitarisation. Et ce même s'il n'avait