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Libération

«La pêche, c'est fini pour longtemps»

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En Galice, le désespoir des pêcheurs sinistrés par la marée noire.
publié le 6 décembre 2002 à 2h02

Aguiño envoyé spécial

Manuel Luances, 52 ans, ne peut réprimer un rictus d'écoeurement. Ce pêcheur de crustacés plonge son filet dans la mer et le hisse chargé d'un fioul épais avant de le déverser dans un grand vide-ordures qui sert d'ordinaire aux déchets municipaux. Sous le poids de l'hydrocarbure, son embarcation menace de chavirer. Depuis mardi, lui et d'autres compagnons d'infortune n'ont cessé de sortir en mer pour remplir une bonne dizaine de containers. Mais, en ce début d'après-midi, Manuel n'en peut plus et se vide soudain l'estomac dans la mer. «Ça me soulève le coeur ! Ce n'est pas à moi de faire ça, mais à ces salauds qui ont largué cette merde dans nos eaux.»

Réserve ornithologique. On est à moins d'un kilomètre d'Aguiño, dernier port de la ria d'Arusa, l'une des plus riches réserves de fruits de mer de la planète. A quelques centaines de mètres, entourée de galettes de mazout menaçantes, apparaît l'île de Salvora, début du Parc national de Galice, l'une des principales réserves ornithologiques de la région. Dans l'embarcation, les quatre pêcheurs sont équipés de masque sans filtre et de lunettes de plongée peu adaptées. L'indignation s'est emparée du port d'Aguiño. Alors que les nappes de fioul du Prestige s'étendent vers l'intérieur de l'immense bras de mer de la ria, où 17 500 familles vivent directement de la récolte de fruits de mer, les pêcheurs sont passés à l'action. Personne ne fait plus confiance dans les digues flottantes, car, souvent, les puissantes