Dans la riche province pétrolière de Kirkouk, même les noms kurdes sur les tombes des cimetières ont été effacées et remplacés par des inscriptions arabes. La destruction des villages et des quartiers de la capitale, la démolition de l'ancienne citadelle, des églises et des mosquées, la confiscation des terres n'a pas suffi. Majoritairement kurde, avec des minorités arabe, turkmène, assyro-chaldéenne, le gouvernorat de Kirkouk fait l'objet, depuis trente ans, d'une campagne d'arabisation et de déplacements forcés destinée à modifier la composition ethnique de la population.
«Pour les Kurdes de cette région, tout est interdit. De travailler, de vendre sa maison à un autre Kurde, de la restaurer, d'hériter, d'enseigner dans d'autres langues que l'arabe, d'envoyer les enfants à l'école, d'avoir le téléphone et même de quitter son quartier sans autorisation. Cette campagne a commencé à l'époque monarchique. Elle s'est accélérée à partir de 1963 (année du premier coup d'Etat du parti Baas, ndlr) et surtout sous Saddam Hussein. Parallèlement, 300 000 colons arabes se sont installés dans cette province», souligne Bakhtiar Amin, directeur de l'ONG Alliance internationale pour la justice (AIJ). C'est pour faire connaître l'ampleur d'un «nettoyage ethnique silencieux et continu» à l'encontre des Kurdes, des chiites et des autres minorités irakiennes que l'AIJ et la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH) ont mené, du 9 au 25 juillet, une mission d'enquête dans