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Libération
Reportage

L'attente infinie des exilés d'Al-Salam

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Ce camp soudanais abrite des familles, chassées de leurs terres par la guerre.
publié le 2 janvier 2003 à 21h36

La plaine autour du camp n'est plus qu'un immense lac de boue ocre. L'orage qui s'est abattu la veille sur Khartoum a raviné les routes et fait fondre le torchis des maisons. Comme à chaque pluie, quelques murs se sont effondrés que les hommes, déjà, s'emploient à rebâtir. Des gamins rigolards ont improvisé un gué pour faire passer les rares voitures. Al-Salam, la paix. C'est le nom officiel de ce camp où s'entassent, à l'ouest de la capitale soudanaise, près de 50 000 déplacés, chassés par la guerre, la famine, la misère. Mais ce camp sans eau ni électricité, eux l'appellent autrement : Jabarona. Littéralement, «on nous a forcés».

«Solidaires». Depuis la reprise de la guerre civile soudanaise, il y a bientôt vingt ans, quatre millions de personnes ont quitté leur terre. A Al-Salam, le flux d'arrivants ne s'est jamais tari, même si les négociations de paix, aujourd'hui suspendues, ont ralenti la cadence. Tribus du Sud, Nuers ou Dinkas, fermiers des monts Nouba ou nomades du Darfour sont installés là. Chacun son quartier, chacun son chef. Animistes, chrétiens ou musulmans mélangés. Aljak Niaw Aljak tourne sa paume vers le ciel : «Qu'importe ce qu'on est. On est tous pauvres, on est solidaires.» La terre battue de sa cahute a été soigneusement ratissée. Aljak s'excuse de l'exiguïté de son logis, il n'attendait pas de visiteurs. «L'accès au camp est très réglementé, il faut un permis, il n'y a que les ONG qui viennent par ici.» Aljak Niaw Aljak est le chef des D