Abidjan de notre correspondante
En se réveillant, hier matin, à Abidjan, le docteur A. veut croire que le calme est revenu. Après les violentes manifestations antifrançaises de la veille, la nuit a été calme. Bien qu'il soit blanc, donc suspect d'être français, il se rend à son cabinet. Mais, vers 10 h 30, ses patients commencent à l'appeler depuis différents quartiers de la ville. Bloqués par des barrages de «jeunes patriotes» qui fleurissent comme des champignons, ils annulent leur rendez-vous. La mort dans l'âme, le praticien s'empresse de regagner son domicile, à l'instar des passants ivoiriens qui vaquaient à leurs occupations au Plateau, écoliers, fonctionnaires, hommes d'affaires. Assaillis, les vieux bus de la compagnie publique quittent en trombe le quartier d'affaires d'Abidjan, bondés et brinquebalants.
Gourdin. En sens inverse, un flot hétéroclite monte vers l'ambassade de France, des hommes jeunes, mais aussi des femmes et de nombreux enfants. Certains sont couronnés de branchages, le visage peint en noir, d'autres portent à la main un gourdin ou un morceau de métal façonné en forme de machette. Ils sillonnent les rues en chantant : «Si c'est gâté, on tue les Français», et scandent le nom du président ivoirien : «Gbagbo, Gbagbo, Gbagbo». Des hélicoptères français de surveillance tournent au-dessus de l'ambassade. Bis repetita : les manifestants, moins nombreux que la veille, sont tout aussi agressifs, ils s'excitent et jettent des pierres. A quelques pas de là, l'