Nous étions des milliers de réfugiés rassemblés en avril 1997 près de Goma (Congo-Kinshasa) pour retourner au Rwanda. Les soldats rwandais étaient autour de nous. Je ne sais pas ce qui s'est passé. C'est devenu soudainement très confus. Il y a eu des tirs d'armes automatiques. Nous avons commencé à courir dans tous les sens. C'était la panique. C'est à ce moment que j'ai perdu la trace de ma fille Honorine, 9 ans. Par la suite, j'ai dû embarquer dans un bus.
C'était impossible de faire demi-tour. Il y avait des barrages partout. C'est comme ça que je suis rentrée sans ma fille au Rwanda. J'ai contacté l'agence de recherche de la Croix-Rouge qui a alerté son antenne de Goma. Mais malheureusement, la région était devenue inaccessible à cause de l'insécurité. Depuis je la cherche. Je sais qu'elle est vivante. D'autres parents ont pu retrouver leurs enfants. En décembre 2001, un ami qui était réfugié dans le même camp que nous a cru la reconnaître au milieu d'autres enfants, à Karehe, près d'une usine à thé de Bukavu. Il l'a appelée. Elle s'est retournée, mais les adultes étaient hostiles à l'égard de mon ami et il n'a pu davantage s'approcher d'elle. Ce qui me chagrine le plus, c'est le fait de savoir que ma fille ne se trouve pas si loin d'ici, mais je suis incapable de m'y rendre. Je suis en train de me renseigner pour savoir si je peux réussir à accéder à cette région, en dépit de toutes les difficultés. J'ai peur pour elle. Honorine a maintenant 15 ans. Une adolescente seule