Tokyo de notre correspondant
Vingt à trente fois par an, le mystérieux cruiser nord-coréen Man Gyong Bong 92 se met à quai dans le port de Niigata. Le «grand bateau blanc», comme on l'appelle ici, en impose avec ses quatre étages et ses 9 670 tonnes. On voit couramment en descendre des groupes d'enfants scolarisés au Japon dans une école de la Chongryon (Association des résidents coréens du Japon), de retour après une excursion scolaire au pays du «cher leader» Kim Jong-il. Le navire repart peu après pour le port nord-coréen de Wonsan, une fois chargée sa cargaison de devises qui ira renflouer les caisses du régime stalinien. Outre ses ventes de missiles, la Corée du Nord utilise en effet le Man Gyong Bong 92 comme l'une de ses sources de devises. Le trait d'union maritime est devenu le dernier maillon communiquant entre le régime stalinien et un Japon où sont établis 637 000 Coréens, dont 180 000 ont de la famille en Corée du Nord. Il s'agit pour la plupart des descendants d'anciens travailleurs forcés envoyés au Japon durant l'occupation de la Corée (1910-1945).
Sommes colossales. «Ce navire a un rôle vital», confirme Lee Young-hwa, un apatride «nord-coréen» né à Sakai (Japon), dont la famille est bloquée en Corée du Nord. Professeur d'économie à l'université du Kansai (Osaka), il a fondé le Renk (Urgent Action Network), une ONG de secours aux réfugiés nord-coréens. «Des sommes colossales sont transportées en Corée du Nord grâce au Man Gyong Bong 92, dit-il. L'argent circule