Moscou envoyé spécial
Face à l'entrée, une imposante peinture représente Joseph Staline, l'air inspiré. Deux draps soyeux donnent au portrait un surcroît de solennité. L'un est rouge, l'autre blanc. Réconciliation posthume des armées, la rouge bolchevique, la blanche tsariste ? Staline, symbole du patriotisme russe réunifié ? C'est une des ambiguïtés de cette exposition organisée par le musée d'Histoire contemporaine de la Russie, à Moscou, la première depuis la disgrâce du petit père des peuples, en 1956, lors du XXe Congrès du Parti communiste de l'Union soviétique et le fameux rapport de Nikita Khrouchtchev. Une manifestation qui intéresse tout le monde et ne satisfait personne.
Larmes et ricanements. Les fervents nostalgiques, qui n'ont plus 20 ans depuis très longtemps, s'agglutinent autour d'un téléviseur où l'on diffuse en boucle la cérémonie des funérailles du moustachu, mort il y a cinquante ans. Ceux qui essuient une larme supportent mal d'entendre dans leur dos des jeunes ricaner devant une taie d'oreiller offerte à Staline par la retraitée Trinova, en 1945, ou cette composition en perles de verre réalisée par la femme au foyer Marinova, en 1952, pour le «chevalier de la gloire russe, ferment de toutes nos victoires, lumières de toutes nos joies».
Purges et goulag. Les héritiers de la dissidence, les enfants dont les parents sont morts au Goulag viennent, eux, vérifier si les répressions staliniennes n'ont pas été oubliées. Elles ne l'ont pas été, mais c'est quasi un