Nairobi de notre correspondant
ça coule tout doucement. Le robinet est ouvert quasiment sans interruption depuis le matin. A ce point d'eau de Kibera, un des bidonvilles les plus peuplés d'Afrique avec au moins 500 000 habitants, il faut quasiment cinq minutes pour remplir un bidon de 20 litres. Alors que la nuit tombe, une dizaine d'hommes et de femmes fait patiemment la queue. Deux bidons par personne à rapporter à la maison. Un lourd fardeau payant à transporter, sur la tête ou le dos, en évitant les écoulements putrides qui serpentent au milieu des cabanes de planches et de tôles. La routine.
Bulldozers. L'eau courante à domicile, comme l'électricité, serait un luxe dont peu d'habitants osent rêver. Kibera fut construit dans l'anarchie, au sud de la capitale kenyane, après la guerre de 14-18 et continue de s'agrandir sans aucune planification. Un vrai casse-tête. «La population est tellement dense que pour amener des bulldozers et y installer des conduites d'eau, il faudrait déloger beaucoup de monde et détruire leur habitation. Quitte à les faire revenir ensuite dans de nouveaux bâtiments avec des robinets en état de fonctionner», explique Lawrence Musyoka, le directeur du service des eaux et égouts de la ville de Nairobi. «Dans une bonne journée, je peux vendre de l'eau à 300 personnes», raconte Peter Okumu, le propriétaire du point d'eau, qui travaille aussi dans le bidonville comme plombier et épicier. Son business est simple et légal : il a payé un abonnement aux