Vienne de notre correspondant
L'Autriche peut-elle se permettre de laisser mourir sa communauté juive ? Telle est la question, en forme d'appel au secours, que vient de lancer Ariel Muzicant, président de l'Israelitische Kultusgemeinde (IKG), l'organe représentatif de la petite communauté des juifs autrichiens, qui ne compte aujourd'hui plus que 6 700 personnes. Responsable financièrement de plusieurs synagogues, de quatre écoles, d'un centre psychiatrique, d'une maison de retraite et de quelques cimetières à moitié à l'abandon, l'IKG se trouve au bord de la faillite. «Si, dans les semaines à venir, l'Etat ne fait pas un geste en notre faveur, nous entamerons, le 1er juillet, une procédure de dépôt de bilan», a averti son président. Dans le bras de fer qui l'oppose depuis des années au gouvernement, Ariel Muzicant a jeté sa dernière carte : soit Wolfgang Schüssel et ses alliés de l'extrême droite sauvent les juifs du gouffre, soit ils devront répondre devant l'Histoire de la disparition d'une communauté vieille de presque mille ans.
L'acte le plus ancien mentionnant la présence d'un juif à Vienne date de 1194. A la veille de l'annexion du pays au IIIe Reich, en mars 1938, le pays comptait 200 000 juifs, une cinquantaine de synagogues et plusieurs centaines d'associations. En 1945, à peine 5 000 juifs vivaient encore dans le pays. 65 000 avaient péri dans les camps de la mort nazis, plus de 100 000 autres s'étaient exilés. Plus aucune association n'existait et, parmi toutes les