Paco Ignacio Taibo II
écrivain mexicain*
«Le G8 m'inspire un sentiment qui, j'en suis sûr, est partagé par des centaines de millions de personnes : une minuscule poignée de gens y prendront des décisions en mon nom, sans ce que je puisse savoir exactement ce qu'ils veulent décider, ni ce qu'ils auront finalement décidé. Ces rencontres, qui se veulent ouvertes, sont en fait totalement fermées. Le G8 d'Evian, c'est pour moi ce sentiment fort d'une différence entre nous et "les autres", qui décident pour nous autres. Quand on vit dans un pays comme le Mexique, où les problèmes économiques et sociaux apparaissent comme une évidence brutale, et où le libéralisme économique a démontré son incapacité à les résoudre, un pays où on continue de vanter les mérites de la baisse des dépenses sociales aussi bien dans les domaines de la santé que de l'éducation, on a la certitude qu'il y a une réalité et une fiction. Cette certitude devient encore plus forte lorsqu'on est mexicain et qu'on assiste à cette apocalypse sociale qui n'en finit pas de disloquer la vie de nos voisins, je parle évidemment des millions d'Argentins. Le G8, c'est une vraie fiction, dont les images envahissent le monde pendant un instant, une fois par an, mais avec une telle intensité que tout le monde en parle. Comme des millions de gens, j'ai déjà vu ces images. Et qu'est-ce que je vois ? Sans faire preuve d'une imagination débordante, je vois des martiens. Mais pas n'importe lesquels. Non. Des martiens de la pire esp