Mossoul envoyé spécial
Bedonnants, souvent chenus, hiératiques dans leurs djellabas blanches et égrainant leurs chapelets de prière, les agas les chefs de quartier et de tribu se réunissent chaque soir à la fraîche dans un jardinet ombragé près de la vieille porte de l'OEuf pour discuter, sur de grands canapés, des problèmes et doléances des habitants de la ville. On évoque des questions de travail, des différends commerciaux, des vengeances et, d'abord, la sécurité. Ils sont une vingtaine, parfois plus, parfois moins, devant cette bâtisse moderne qui a remplacé, depuis un quart de siècle, l'élégante architecture ottomane de l'ancienne «maison des agas», rasée pour faire place à un échangeur routier. «Sans nous, les violences auraient continué pendant des semaines et les Américains n'auraient rien pu y faire», assure le cheikh Yunes Yahya Daoud Aga, chef de la grande tribu des Hayalin.
Milices armées. Hérissée de minarets et de coupoles d'églises, l'orgueilleuse Mossoul, capitale du Nord et troisième ville d'Irak avec plus de 1,5 million d'habitants, est majoritairement arabe, mais aussi kurde, turkmène, chrétienne. Les réseaux de pouvoir traditionnels y restent tout-puissants. Quand les pillages ont commencé, au moment où l'armée irakienne abandonnait la cité quelques jours après la chute de Bagdad, ce sont eux qui ont repris les choses en main. Dans chaque quartier ont surgi des milices armées, quelques milliers d'hommes en tout, barrant dès la nuit tombée l'entrée des r