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Enquête

Algérie : l'aide inhumanitaire

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D'abord inerte, le pouvoir monopolise désormais les secours aux sinistrés. Dans les camps règnent l'absurde et l'arbitraire.
publié le 4 juillet 2003 à 23h40

Boumerdès envoyée spéciale

C'est une de ces histoires drôles que les Algériens ont le génie de trousser au plus sombre d'une tragédie. Cette fois, elle est absolument véridique mais se raconte comme une blague, avec force pantomimes, dans les camps de sinistrés, après le tremblement de terre qui fit 2 300 morts et 130 000 sans-abris le 21 mai. Les scouts musulmans, une organisation d'Etat, sont chargés de distribuer le fameux «repas chaud» promis, entre autres largesses, par le président Abdelaziz Bouteflika. Les voilà donc, passant de tente en tente à l'heure de la soupe. Au menu : pâtes et oeufs durs. Sous les toiles surchauffées, les macaronis n'ont aucun succès. Alors, au bout d'un moment, un des scouts explose : «On a dit qu'il fallait un repas chaud. Celui qui ne prend pas les macaronis n'aura pas droit à l'oeuf.» Khaled, ingénieur de Zemmouri, n'en finit pas de mimer la scène. «C'étaient des gamins, à peine une ombre de moustache. Mais déjà, comme l'élève singe le maître, ils avaient ce geste tatillon et sévère, cette manière de faire la bienfaisance comme on donne un coup de trique, façonnée par quarante ans de bureaucratie dont les onze dernières sous état d'urgence.»

«Manifestez, et vous verrez !»

Un mois après, «le tremblement de terre a déchiré le voile : l'Algérie apparaît à nu. On est sinistrés depuis quarante ans. Maintenant, on a le statut, c'est tout», dit un fonctionnaire dans un camp de Boumerdès. Au moment du sinistre, «ce sont les individus normaux qui ont