Expert suisse en stratégie, Jacques Baud vient de publier à Paris la Guerre asymétrique (1) dans lequel il pronostique «la défaite du vainqueur». Lieutenant-colonel dans les services de renseignements, il travaille aujourd'hui à Berne au département fédéral des Affaires étrangères sur les questions de sécurité internationale. Il s'exprime ici à titre personnel sur l'évolution de la situation en Irak.
Selon vous, la guerre asymétrique est «une forme de conflit où le faible pousse le fort à une situation qui transforme les succès tactiques en défaite stratégique». Assiste-t-on à cela en Irak avec la multiplication des attaques contre les troupes américaines ?
Non, ce n'est pas de là que vient le danger. Il ne s'agit que d'escarmouches qui compliquent la vie des Américains, mais qu'ils parviendront à maîtriser. Derrière ces attaques, on ne voit ni message politique clair, ni soutien populaire, même chez les sunnites. Je ne vois pas où elles conduisent. Ce sont des actions sans arrière-plans politiques : où sont les appels du Baas ou de Saddam Hussein à la résistance armée ? On attache trop d'importance à ces escarmouches, on ne voit pas l'essentiel.
Qui est ?
La résurgence des forces chiites, qui consolident leur pouvoir. Les chiites capitalisent l'islamisme latent et gagnent une légitimité en assumant des fonctions auprès de la population, comme la sécurité.
On ne peut pas encore parler de guerre avec les chiites, même asymétrique...
Absolument. Ce n'est pas une guerre, mais les for