Najaf envoyée spéciale
Sur le promontoire, qui coiffe comme un kiosque à musique la place de la Révolution à Najaf, une centaine d'hommes en costume ont déployé leur banderole des «Employés au ministère du Pétrole». Des chefs de tribu s'éventent de leurs drapeaux. Lorsque deux vieillards en keffieh s'approchent, un policier irakien leur agite un pistolet dans les côtes. «Allez-vous-en. Il n'y a pas de place pour les citoyens normaux ici : c'est les privilégiés.» Les deux reculent, impressionnés. «Dieu soit loué ! La police ne nous a pas tapé dessus comme sous Saddam. Nous sommes sur le chemin du progrès.» Un fonctionnaire se fâche. Il avait été chassé de l'inspection de l'éducation en 1994. «Aujourd'hui, tous les anciens baassistes ont repris leur poste. Moi non.»
Voiture piégée. Autour, depuis les petites heures du matin, coule sur des kilomètres une foule sans nombre pour l'enterrement d'un des plus hauts dignitaires chiites, Mohammed Baqr al-Hakim, tué après son prêche au mausolée de l'imam Ali, où une voiture piégée fit plus de cent morts vendredi dernier. «J'avance vers toi, Dieu, dans ma tenue ensanglantée où j'ai vengé Al-Hakim», chantent des jeunes gens.
A quelques rues de là, commence le quartier de marbre, de statues, de pelouses, où vivaient les puissants du régime déchu. Tout est désert. Maniant truelle et kalachnikov, des hommes murent la porte d'une villa dévastée. Le propriétaire, Karim al-Ghais, «un bel homme de 50 ans sans un cheveu blanc», était joueur de tamb