Menu
Libération
Reportage

«On est sous la tente de l'ennemi»

Article réservé aux abonnés
publié le 11 septembre 2003 à 0h56

Bagdad envoyée spéciale

Quand Mahmoud Wasfi a été nommé président du conseil municipal dans le quartier Adamiah, les militaires américains lui ont demandé s'il appartenait au parti Baas sous Saddam Hussein. Wasfi s'en étrangle encore. «Mais si ! Bien sûr ! Comme tout le monde. J'aurais dû laisser mes enfants mourir de faim ?» Comme cinq autres membres (sur huit) du conseil municipal, il n'a pas fait d'histoire pour signer le formulaire en anglais dans lequel il répudie le parti. Désormais, cet ancien champion de lutte devenu fonctionnaire siège chaque matin sur une placette, à l'ombre de la mosquée Abou-Hanifa, derrière une étincelante forteresse de canettes de Pepsi-Cola. Une foule de jeunes gens espérant un travail, de courtisans volubiles et de messieurs âgés, dont les keffiehs dodelinent au rythme des conversations, se bousculent sous les palmiers poussiéreux. Passe un char américain. «Comme tous les jours, commente un professeur. Depuis six mois, jamais un seul d'entre eux ne m'a adressé la parole autrement que pour donner un ordre.»

Ici, comme ailleurs à Bagdad, une bonne partie des classes moyennes «pensait au début que chasser Saddam serait un terrain d'entente acceptable entre les forces de coalition et nous», explique un autre élu municipal. «Nous nous attendions à être traités en partenaires et que ces conseils, par exemple, seraient une chance pour les gens cultivés de trouver un rôle dans leur pays après trente-cinq ans d'humiliations. Et nous nous retrouvons pous