Bukavu envoyée spéciale
«J'étais chez ma grand-mère au village. Des soldats sont venus. Nous étions 18 filles. Sept ou huit personnes nous ont violées, puis nous ont emmenées dans la forêt. Quatre d'entre nous ont réussi à fuir. Après, j'ai su que j'étais enceinte. Je n'ai pas voulu retourner là-bas. Alors je suis ici, à Bukavu, avec ma fille qui ne saura jamais qui est son père.» Feza avait 13 ans. Son bébé a aujourd'hui trois mois. A Bukavu, le chef-lieu du Sud-Kivu (Est de la République démocratique du Congo), elle a été recueillie par Pauline London Njabuka, responsable d'un programme pour les filles mères de la congrégation des soeurs Dinah. La religieuse s'occupe d'une soixantaine de fillettes qui ont subi ce type d'exactions. La dernière venue n'a pas 13 ans.
Dans l'Est de la RDC, militaires et groupes rebelles sont accusés par les organisations humanitaires et les Nations unies d'avoir violé massivement, durant un conflit qui a fait plus de 3 millions de morts en cinq ans. A en croire Pascal Kabungulu, responsable de l'organisation de défense des droits de l'homme Héritiers de la Justice, les bandes armées sévissent toujours. «A Kinshasa, on dit que la guerre est terminée, mais sur le terrain, les animateurs se comportent comme avant. Ils utilisent leur arme pour faire n'importe quoi.» Face à la loi du silence, l'ampleur des violences est quasiment impossible à évaluer.
Séquelles. «Vous avez 2 000 cas à Shabunda (à 300 km de Bukavu, ndlr). Dans d'autres villages, toutes