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Libération

En Louisiane, la nostalgie française a des états d'âme

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publié le 22 décembre 2003 à 2h25

Nouvelle-Orléans envoyé spécial

Au moins, Antonin Scalia est venu. Engoncé dans son costume, cheveux charbons tirés en arrière, le plus célèbre juge de la cour suprême des Etats-Unis ­ parce que le plus conservateur ­ est là, occupé à descendre des flûtes de champagne et à gober les petits fours. Il a fait, ce week-end, le déplacement de Washington à la Nouvelle-Orléans pour participer au bicentenaire du rachat de la Louisiane à la France, une des rares occasions de célébrer aujourd'hui l'amitié franco-américaine. Il n'a pourtant pas encore pardonné aux Français : «Les récents événements ont mis à rude épreuve ma francophilie. Vous savez, mon fils est capitaine d'infanterie à Bagdad», grogne-t-il. Malgré tout, pour les francophones de Louisiane, sa présence est encourageante : c'est le signe que les plaies peuvent se refermer.

Rendez-vous manqué. Il y a deux cents ans, lorsque la France et les Etats-Unis s'entendaient bien, la Louisiane était un territoire qui couvrait quinze Etats actuels, des Grands Lacs au golfe du Mexique. Napoléon, occupé à guerroyer en Europe, avait décidé de se débarrasser de ce fardeau pour renflouer ses caisses. Thomas Jefferson avait pu doubler la taille des Etats-Unis de l'époque, en achetant la Louisiane «pour une chanson» comme disent les Américains, c'est-à-dire pour des cacahuètes : 15 millions de dollars de l'époque (250 millions de dollars aujourd'hui).

En 1903 et en 1953, les présidents Theodore Roosevelt et Dwight Eisenhower s'étaient déplacé