Bagdad envoyé spécial
Bon dévot, cheikh Fakhri al-Qaïssi remercie le Miséricordieux. «Grâce à Dieu», le secrétaire du Conseil suprême pour la prédication, l'orientation et les fatwas a échappé à la rafle. D'un cheveu. Outrageusement chanceux, l'imam avait quitté le centre Ibn Tayimiya quelques instants seulement avant que les troupes de la coalition n'investissent en force cette mosquée du quartier de Yarmouk, au sud-ouest de Bagdad, haut lieu de l'islamisme militant d'obédience salafiste. Fouille musclée. Les portes de la salle de prières sont enfoncées à coups de bottes. «Les soldats n'ont pas retiré leurs chaussures», note l'imam ulcéré. Cheikh Madhi al-Soumaïdaï, chef de file du courant fondamentaliste sunnite en Irak, déjà emprisonné sous le règne de Saddam Hussein, croupit désormais dans le secret d'une base américaine.
La rage étouffe cheikh Fakhri. D'une voix aigrelette, l'imam prophétise : «Tel Pharaon, les Américains ont déclaré la guerre à Dieu. Quelle arrogance que de braver sa puissance !» Menace à peine voilée. «Propagande», rétorque le général Mark Kimmitt qui assure que ses hommes ont «respecté la sainteté des lieux». Seulement, la mosquée «abritait des activités terroristes», jure l'officier. Et pour preuve de ses accusations, il étale ses prises : onze fusils d'assaut, deux lance-roquettes, huit grenades, un mortier de 60 mm, trois pains d'explosif, des sacs de poudre noire saisis lors de la fouille. Arsenal du plus bel effet. Mais chaque mosquée de Bagdad po