Le Caire de notre correspondante
Il en a des sueurs froides. Accroché à son téléphone portable, les doigts crispés sur une liasse de billets neufs et craquants, Ali s'emporte. Depuis deux semaines, ce médecin cairote ne respire plus qu'au rythme des fluctuations du «bremer», le surnom du nouveau dinar irakien. Destiné à remplacer le billet frappé du portrait de Saddam Hussein, le bremer du nom de l'administrateur américain en Irak est à l'origine d'une vague de spéculation sans précédent en Egypte, touchant les milieux les plus aisés comme les moins nantis. «J'ai emprunté de l'argent pour en acheter», confie Medhat, réceptionniste, dont le salaire mensuel ne dépasse pas 180 livres égyptiennes (LE) environ 24 euros.
Marché noir. Depuis sa mise sur le marché il y a trois mois, le dinar irakien a vu son prix s'affoler. Alors que sa valeur réelle est estimée à environ 4 500 LE pour un million de dinars, il a grimpé à 18 000 LE début janvier. De quoi déclencher la frénésie boursicotière des Egyptiens, nourris de la réussite légendaire de quelques hommes d'affaires enrichis brutalement après avoir parié sur le dinar koweïtien au début de la guerre du Golfe. Plombée par la crise économique qui secoue leur pays et par la chute de leur devise, la majorité des Egyptiens veut tenter sa chance, persuadée que le retour à la normale de l'économie irakienne va provoquer la flambée du dinar.
La plupart des coupures revendues au marché noir proviennent de Jordanie et des pays du Golfe, pa