Le visage à peine visible derrière sa dense chevelure ébouriffée, mêlée à son interminable barbe, le prophète déchu Shoko Asahara (de son vrai nom Chizuo Matsumoto), 48 ans, reste depuis les premières minutes de son procès, en 1996, terré dans son silence. Les familles de victimes, survivants et parents de survivants de l'attentat au gaz sarin commis par la secte Aum Shinrikyo dans le métro de Tokyo en 1995 l'accusent du crime «le plus sournois» : «avoir planifié l'horreur». Ils lui reprochent aussi de «n'avoir jamais reconnu ses torts, n'avoir rien dit, ne pas avoir dévoilé le vrai motif de ses crimes» au cours des 256 audiences (quatre par mois) du procès. Lors des dernières audiences, alors que le juge Shoji Ogawa l'encourageait à «dire quelque chose», Asahara, yeux clos, bras croisés, est resté muet.
Comment celui qui se croyait philosophe, soucieux d'enseigner son mysticisme hindou et son bouddhisme primitif chargé de visions apocalyptiques, s'est-il donc métamorphosé en meurtrier ? Un journaliste japonais, Yoshifu Arita, a mené l'enquête. Il en a sorti un essai qui a dérangé la vox populi, laquelle ne voyait en Asahara qu'un horrible monstre misanthrope. On y apprend dans le détail que, avant de devenir le leader d'Aum, Asahara, venu du Kyushu (sud du Japon), a eu un parcours jalonné d'échecs et de difficultés. Familiales, scolaires, professionnelles... Qu'enfant «une série de chocs l'a profondément déstabilisé».
Presque aveugle. Sa vue déficiente (il est aveugle d'un oe