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Libération

«On est comme en prison avec la peur en plus»

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publié le 22 mars 2004 à 23h52

Lipjan envoyé spécial

Côté rue, la façade du café est aveugle, avec les fenêtres et les portes obstruées depuis des années par de grosses planches en protection contre des jets de pierres, voire des rafales de kalachnikov. «Cela fait longtemps que nous vivons dans la peur, mais maintenant c'est encore pire et ces deux jours de terreur nous ont fait replonger de cinq ans en arrière», explique Zoran Trajkovic, dernier médecin serbe de Lipjan, grosse commune de 30 000 habitants à 30 km au sud de Pristina, où quelque 2 000 Serbes vivent dans un quartier ghetto au milieu de 10 000 Albanais. C'est en passant par les petits chemins boueux entre les maisons basses qu'ils gagnent chaque soir la petite salle enfumée et toujours éclairée grâce à un générateur. «La ville est là tout autour mais nous n'y allons plus depuis des années, sinon avec une escorte pour les deux matinées de marché qui nous sont octroyées, mercredi et samedi, mais même ça, maintenant, nous est impossible. On est comme en prison avec la peur en plus», se lamente Miroslava Simeonovic, veuve, qui élève seule les filles de son fils, tué en juin 1999, juste après le départ des forces de Belgrade de cette province du sud de la Serbie désormais peuplée à 95 % d'Albanais de souche et placée sous protectorat international.

Décombres calcinés. Les soldats finlandais de la Kfor ont déployé leurs blindés, déroulé des barbelés et reconstruit en urgence un mirador avec des projecteurs pour surveiller la nuit les alentours. Les a