Derrière les secouristes massés autour d'une femme accidentée, une voix d'enfant s'élève : «Où est ma maman ?» Sur les écrans de télé colombiens, cette pub choc a donné l'an dernier le coup d'envoi d'une nouvelle campagne de la mairie de Bogota consacrée aux accidents de la route. Puis les habitants ont découvert des milliers d'étoiles jaunes peintes sur le bitume, représentant tous les piétons tués en cinq ans. Et sur place, près de 500 «guides civiques», armés d'un sifflet et d'une veste orange, ont rappelé pendant quatre mois la nécessité de respecter les passages cloutés.
Heure «carotte». Cette action symbolique, qui a permis de réduire d'un tiers le nombre de piétons tués, illustre la politique de sécurité routière originale menée depuis dix ans par la ville. «Bogota est vue comme un exemple pour l'Amérique du Sud et le monde», affirme Marta Lucia Castro, de l'Organisation panaméricaine de la santé. En 2003, moins de 600 personnes ont été tuées par la circulation dans cette ville de 7 millions d'habitants, contre plus de 1 100 en 1995. Tout avait pourtant débuté comme un gag, cette année-là, quand le maire de l'époque, Antanas Mockus, avait lancé une armée de mimes vêtus de blanc aux feux rouges de la capitale. Après avoir décortiqué les statistiques d'accidents, les fonctionnaires avaient en effet ciblé les principales victimes : piétons, deux-roues et passagers des soirées de fête. Les «Augustes» étaient donc chargés de réprimander, par gestes et sans