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Libération

Kagame accuse la France en la «regardant dans les yeux»

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publié le 8 avril 2004 à 0h09

Kigali, de notre correspondant.

Une femme lance un cri. Elle se lève, dévale les gradins du stade de Kigali, renverse les chaises en plastique qui se trouvent sur son chemin. «Ils sont tous morts, ils les ont tous tués !», hurle-t-elle d'une voix stridente qui glace le reste des participants à la cérémonie du dixième anniversaire du génocide. Ses pleurs, ses sanglots se répercutent aussitôt parmi les milliers de rescapés venus, sous un soleil de plomb, commémorer leurs morts. La même scène se répète aux quatre coins du stade et, à chaque fois, des hommes doivent maîtriser les personnes frappées par ces crises de détresse, voire les évacuer. C'est que, face à la tribune présidentielle où sont assis le président rwandais, Paul Kagame, et ses hôtes étrangers, d'autres survivants des massacres racontent leur histoire, récitent des poèmes. «Les tueurs étaient nos voisins, avec qui nous partagions la bière et le lait, rappelle un poète, sur un ton vibrant et chantant. Nous pouvons être rwandais ensemble, à nouveau.»

Ces rescapés ont tous en commun le génocide. En à peine cent jours, d'avril à juillet 1994, leurs voisins hutus ont massacré, à coups de machette, de gourdin ou de fusil, quelque 800 000 personnes, des Tutsis pour l'immense majorité, mais aussi d'autres Hutus opposés au régime extrémiste qui a planifié et mis à exécution cette extermination méthodique. Un génocide, le quatrième du XXe siècle et le premier du continent africain, qui s'est déroulé sous les yeux impassibles