Moscou, de notre correspondante.
La salle où s'est ouvert hier le procès le plus attendu de l'année en Russie est à peu près grande comme une salle de classe. Tout le décor, pupitres en bois, câble électrique qui pendouille dans le vide et bousculades des journalistes pour s'arracher les quelques places disponibles, ferait d'ailleurs penser à une vaste plaisanterie de potaches, si le sujet n'était si grave. Enfermés dans une minuscule cage, Mikhaïl Khodorkovski, première fortune de Russie, et son associé Platon Lebedev risquent dix ans de prison pour escroquerie et fraude fiscale à grande échelle, alors que leur tort principal est à l'évidence d'avoir voulu défier le président Vladimir Poutine. Ioukos, la compagnie dont Khodorkovski avait fait le premier groupe pétrolier russe, est menacée de faillite : le cours de l'action a de nouveau chuté hier à la Bourse de Moscou, les analystes craignant que ce conflit initié par le Kremlin aille jusqu'au démantèlement du groupe. Montée à plus de 14 dollars en juin 2003, juste avant l'arrestation de Platon Lebedev, l'action Ioukos ne valait plus que 6,2 dollars, hier soir.
Dédain. Apparu en jeans sales et mocassins usés pour le premier jour de son procès, Khodorkovski, 41 ans, a bien montré quel dédain il éprouve pour ce tribunal, dirigé par trois jeunes femmes, trois juges qui semblaient au contraire avoir soigné leur brushing pour ce grand jour. «Vos honneurs, j'ai perdu ma naïveté depuis longtemps déjà, et je ne veux pas abuser de vot