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Libération

Irak : vingt ans sans sortir pour s'en sortir

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Dans les années 80, deux frères poursuivis par la police se sont terrés chez eux jusqu'à la chute du régime.
publié le 12 juillet 2004 à 1h25

Bagdad envoyé spécial

A 40 ans, Ibrahim al-Badr al-Kaïssi attend les résultats de son baccalauréat, qu'il vient de passer. Il devait déjà se présenter à l'examen en... 1982. Une date maudite : celle qui l'a vu s'emmurer dans la maison familiale du quartier Karada, à Bagdad, s'interdisant à jamais de franchir le seuil de la pièce principale, pour n'en ressortir que l'an passé. Soit vingt et un ans plus tard. L'histoire remonte à 1980. A cette époque, son oncle, Ali al-Badr, travaille dans le magasin de pneumatiques de son père tout en militant au Dawa al-Islamiya (parti islamiste irakien, matrice de toutes les organisations radicales chiites). Son arrestation entraîne bientôt celle de tous les adultes mâles de la famille. «J'ai perdu mon père, un frère aîné et même ma soeur, appréhendée elle aussi parce que son mari s'était enfui en Iran. Plus six oncles et neuf cousins. Au total, cela fait dix-huit personnes. Toutes exécutées», raconte-t-il. Ibrahim a alors 16 ans. Il est trop jeune pour être emmené par la terrible Amn al-Daoulat, l'une des polices secrètes du régime. Mais, deux ans plus tard, il a l'âge qu'elle revienne le chercher. Commence alors sa vie clandestine.

Culot incroyable. Ibrahim partage alors le sort de son frère Saad. Il a six ans de plus et se cache déjà depuis 1980. Sans leur mère, qui les a poussés à se planquer, les deux jeunes gens n'auraient pas survécu. C'est elle qui va orchestrer avec un incroyable culot leur dissimulation. Quand la police, qui est à l