L'adhésion de la Turquie ne fait pas consensus à Bruxelles. Alors que la Commission européenne s'apprête à rendre, le 6 octobre, un avis sans doute positif sur l'ouverture de négociations avec Ankara, deux commissaires sont montés à la charge. Le libéral néerlandais Frits Bolkestein, en charge du Marché intérieur, a brandi lundi le spectre d'une «islamisation» de l'UE. Citant l'expert américain Bernard Lewis, selon qui l'Europe deviendra musulmane d'ici la fin du siècle, en raison des flux migratoires et de la démographie, il ajoutait que si cela se réalise, «la libération de Vienne en 1683 [attaquée par l'empire ottoman] aura été vaine.»
Son collègue autrichien Franz Fischler partage cette hostilité. Dans une lettre à ses pairs de l'exécutif européen, révélée vendredi par le Financial Times, le commissaire à l'Agriculture énumère les dangers d'une adhésion turque. Il émet «des doutes» quant à l'ancrage «démocratique et laïc à long terme de la Turquie», et craint «un retour de bâton fondamentaliste». Pour Fischler, admettre ce pays culturellement «oriental» et géographiquement asiatique ouvrirait «une boîte de Pandore géostratégique». Comme Bolkestein, l'Autrichien juge par ailleurs insupportable le coût de l'intégration d'Ankara, qu'il chiffre à 11,3 milliards d'euros par an rien que pour les subventions agricoles. Dernier argument, l'hostilité de bon nombre de citoyens de l'UE à l'entrée de la Turquie : «Nous ne pouvons pas continuer à ignorer l'opinion publique et laisser