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Libération
Interview

«Dramatiser pour éclipser les nouvelles d'Irak»

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publié le 15 septembre 2004 à 2h08

New York, de notre correspondant.

Ali A. Mazrui est professeur de sciences politiques, expert des questions africaines à l'université de Binghamton, à New York. Il répond aux questions de Libération sur le Darfour.

Pourquoi l'administration Bush a-t-elle décidé de parler de «génocide» au Darfour la semaine dernière, après avoir refusé d'employer le terme durant l'été ?

L'une des interprétations est que le gouvernement américain ne veut pas que se répète une situation similaire à ce qui s'est passé au Rwanda, avec l'Amérique qui a été accusée de négligence. Le gouvernement sait notamment que ce qui se passe au Darfour est un sujet d'extrême importance pour la communauté africaine-américaine, pour qui il s'agit d'un génocide, et il ne veut pas la décevoir. Mais certains estiment aussi que ce qui se passe au Darfour est utilisé par l'administration pour détourner l'attention des problèmes en Irak. Dramatiser le Darfour permet d'éclipser un peu les nouvelles sur Bagdad.

Les groupes chrétiens, ainsi que le Black Caucus (représentant les élus noirs à Washington, ndlr) ont fait pression pour que l'on utilise le terme «génocide». Difficile de ne pas entendre leurs voix en pleine campagne électorale.

Bien sûr. Nous sommes en pleine course à la Maison Blanche et les positions qui sont prises par l'administration en place ou par John Kerry (le candidat démocrate a lui aussi évoqué un génocide, ndlr) ont toutes des répercussions politiques. Même quand les problèmes du Soudan étaient limités