Bagdad envoyé spécial
Sur ordre du médecin, il dénoue son keffieh avec une gêne pudique, comme s'il se déshabillait. Cela fait près de dix ans qu'il ne quitte plus sa coiffe. «Je la garde même à la maison», précise Ghassan Abdoul Zarha. Au milieu des patients qui vont et viennent, il découvre lentement de chaque côté du crâne une compresse ensanglantée. Sous les bandelettes pendent des bouts de peau flasque, première étape d'un processus qui doit lui permettre de redevenir un homme comme les autres. Debout devant lui, le Dr Ali Arrif explique la marche à suivre : «Nous avons augmenté sa masse cutanée. Nous allons ensuite prélever un peu de cartilage de ses côtes que nous allons façonner, puis greffer sous sa peau.» Au terme de l'opération, Ghassan Abdoul Zarha possédera à nouveau deux semblants d'oreille. Sur les photos d'autres patients, le résultat tient davantage du moignon que du pavillon auriculaire. «Une prothèse artificielle donne un bien meilleur aspect. Mais il n'y en a pas dans le pays», s'excuse ce chirurgien plastique.
Zélés. Comme nombre de ses concitoyens, Ghassan Abdoul Zarha a été condamné à la flétrissure, stigmatisé, désigné à la vindicte. Jeune conscrit, cet habitant de Bassora s'était enfui en avril 1990 parce que sa solde de militaire ne lui permettait pas de nourrir sa famille. Arrêté après quatre ans de cavale, il a subi la peine réservée par Saddam aux déserteurs : l'oreille coupée. Dans son cas, les deux organes ont été tranchés. Dans ce sud chiite mar