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Libération

La société russe rongée par le cancer de la Tchétchénie

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publié le 11 décembre 2004 à 3h26

Vladimir envoyée spéciale

Dmitri a perdu une jambe en Tchétchénie et ne se plaint pas. Il vit chez ses parents, en haut d'une barre HLM de Vladimir, ville berceau de l'histoire de la Russie, avec 1 150 roubles par mois (31 euros). «Bien sûr, ce n'est pas beaucoup pour vivre, concède-t-il. Surtout que depuis un an, j'ai perdu mon travail de vendeur. C'était devenu trop dur physiquement», raconte ce garçon de 28 ans. Le 28 décembre 1994, la première guerre de Tchétchénie venait tout juste de commencer et son convoi est tombé dans une embuscade : «C'était tôt le matin, tout le monde dormait dans le camion. Nous étions une vingtaine... Nous sommes quatre à avoir survécu.»

Dix ans de guerre en Tchétchénie ont saigné la société russe comme aucun autre conflit depuis la Deuxième Guerre mondiale. Dans une ville de 350 000 habitants comme Vladimir, le nombre de morts est estimé entre 126 et 400. Mais le décompte précis, hommage minimum que l'on pourrait rendre aux morts pour la Russie, est refusé. «Je ne vois pas pourquoi je vous donnerais ce chiffre. Et puis, c'est l'heure de mon déjeuner», rétorque le général Nikolaï Sienchov, chef du bureau militaire local, raccrochant deux fois de suite le téléphone. Le nombre des blessés est aussi tenu secret : «Le comité militaire refuse de nous donner la liste des invalides, en expliquant qu'il s'agit d'une opération de contre-terrorisme», soupire Natalia Volynova, responsable d'un centre pour invalides.

Cercueil. Nikolaï Kirillov, président de l