Tunis envoyé spécial
Dans tout autre pays arabe, ç'aurait été le contraire. Mais nous sommes à Tunis, sur l'avenue Bourguiba, les «Champs Elysées» de la capitale. Parmi la foule de jeunes gens qui déambulent dans la chaleur tardive de la fin octobre, on ne voit qu'eux. Elle, la quarantaine, jupe longue, chemisier blanc boutonné jusqu'au menton, voile beige clair qui ne laisse pas dépasser un cheveu. Lui, plus jeune, dégaine «à l'afghane» : djellaba courte, baskets, la barbe en désordre, les yeux de braise soulignés au khôl. Au milieu des minettes en jean moulant et des loulous gominés, ils détonnent.
Répression. La foule s'écarte prudemment sur leur passage. Elle sait d'instinct que leur look est synonyme d'ennuis avec les autorités. Depuis le début des années 90, le pouvoir tunisien a engagé une répression féroce de l'islamisme. Dans les quartiers populaires, les policiers arrachent les voiles des femmes. A l'université, l'entrée est interdite aux voilées et une barbe un peu trop longue peut valoir un interrogatoire serré. Pourtant, Mohamed et Fatima ce sont les prénoms qu'ils choisissent de donner n'ont pas peur d'afficher leur foi. «Nous ne sommes pas des pestiférés. Nous ne réclamons que le droit de nous habiller comme l'islam nous le demande, avec modestie», explique Fatima. Comme ils ne sont ni étudiants ni fonctionnaires, Mohamed et Fatima n'ont pas trop d'ennuis. Mais parfois les policiers arrêtent Mohamed à la sortie de la mosquée : «Ils m'emmènent au commissariat