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Analyse

Israël et la Shoah, un lien quasi ombilical

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Auschwitz, 80 ans aprèsdossier
L'Etat fondé après le génocide s'est conçu comme «la compagnie d'assurances du peuple juif».
publié le 28 janvier 2005 à 0h11
[Cet article a été publié dans Libération en janvier 2005]
Auschwitz est partout. Emissions spéciales en direct, suppléments des quotidiens. Tribunes et témoignages de rescapés de «l'indicible». Israël a célébré le 60e anniversaire de la libération du camp dans une profusion de cérémonies. Votée par les Nations unies en 1947, la naissance d'Israël, comme terre d'accueil, est due en partie aux foules innombrables de «personnes déplacées» qui attendaient, dans des camps, le retour dans des patries qui ne voulaient plus d'elles et dont nombre d'entre d'elles ne voulaient plus.

«Israël a retenu la leçon de la Shoah et, depuis sa création, il a appris à se défendre, à défendre ses habitants contre ses ennemis et constituer un abri pour les juifs, où qu'ils soient», a déclaré mercredi, en une commémoration spéciale devant le Parlement, le Premier ministre Ariel Sharon. «La leçon, c'est que nous ne pouvons compter que sur nous-mêmes.»

Israël est devenu «la compagnie d'assurances du peuple juif», titrait le quotidien Yédiot Aharonot ce jour-là. «Une des fonctions de l'Etat d'Israël est de permettre aux juifs dans le monde de vivre dans la sécurité et la paix», affirme le journal. Ce lien, quasi ombilical, avec la Shoah est inscrit dans la vie quotidienne de l'Etat juif. Une institution comme Yad Vachem, le mémorial de la Shoah à Jérusalem, y joue un rôle central : là, visiteurs officiels, touristes, mais aussi jeunes conscrits rendent une visite obligée à ce haut lieu de la mémoire. Et à quelques jours de la fête de l'Indépendance, au printemps, la Journée de la Shoah et de l'héroïsme immobilise le pays pendant la sonnerie des sirènes. Tout est fait pour que le «plus jamais ça» pénètre en profondeur les consciences.

Il n'en a pas toujours été ainsi. Les rescapés de la Shoah se souviennent que l'accueil dans leur nouvelle patrie ne fut pas toujours exemplaire. De l'après-guerre est née une horrible expression de l'argot hébreu, sabon («savon»), pour désigner les nouveaux venus pâles et faibles en comparaison du sabra (juif présent en Palestine avant la cr