Edifiés par sa capacité à échapper à sept complots et à un grave accident d'avion, les Togolais n'étaient pas loin de le croire indestructible. Mais le président Gnassingbé Eyadéma, l'homme aux éternelles lunettes noires et à la carrure d'athlète, a rendu les armes, samedi matin, à l'âge de 69 ans. Malade depuis plusieurs années, le doyen des chefs d'Etat africains, au pouvoir depuis 1967, séjournait régulièrement dans des cliniques en Italie et en Suisse. Avec lui disparaît, estime Eric Deroo, auteur d'un documentaire sur le défunt président, «une espèce hybride de dirigeant africain issu de la coloniale» (1). Un digne représentant de cette «Françafrique» en nette perte de vitesse.
Grade modeste. Né en 1935 dans une famille paysanne du nord du Togo, Eyadéma a à peine 18 ans quand il s'engage dans l'armée française. C'est alors un solide gaillard, auréolé de son titre de champion de lutte obtenu plusieurs fois d'affilée. Durant une dizaine d'années, il va combattre, notamment en Indochine et en Algérie, avant de revenir, en 1962, au Togo avec le modeste grade de sergent-chef. Jusqu'à sa mort, Eyadéma n'aimait rien tant qu'évoquer ces années-là, tout en écoutant En passant par la Lorraine...
Indépendant depuis deux ans, le Togo ne sait pas où caser ses encombrants soldats de la «coloniale». En janvier 1963, le sergent-chef désoeuvré participe au renversement du premier président togolais, Sylvanus Olympio. A la fin de sa vie, Eyadéma niait mollement l'avoir achevé de ses propre