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Libération
Interview

«Les nazis ont fait de cette ville un symbole des crimes des alliés»

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publié le 14 février 2005 à 0h34

A Berlin

L'historien Matthias Neutzner a vécu toutes les commémorations du bombardement de Dresde, en ex-RDA d'abord, dans l'Allemagne réunifiée ensuite. Dans un ouvrage paru cette semaine et intitulé la Lumière rouge (1), il démonte le mythe de Dresde, ville injustement anéantie par les Alliés.

Dresde se perçoit encore comme la victime d'un bombardement injuste. Pourquoi ?

Le fait que les Alliés aient réussi en une seule nuit à réduire Dresde en cendres était en soi un événement exceptionnel. Hambourg était, certes, comparable en superficie et en nombre de tués (environ 40 000), mais il a fallu plusieurs jours pour arriver à ce résultat. Dès le 15 février, la propagande nazie a fait de Dresde un symbole des «crimes commis par les Alliés» contre une ville d'arts et de culture. Les nazis ont habilement utilisé la presse des pays neutres, et notamment la Suède. D'abord, ils ont laissé accréditer la thèse que la destruction de Dresde était la plus grande catastrophe de la guerre et ont laissé courir des bruits sur le nombre de morts, qui sont passés de 200 000 à 500 000 personnes (le chiffre officiel est de 35 000 morts). Les correspondants suédois en poste à Berlin n'avaient pas le droit de se rendre sur place, mais le régime nazi leur a fourni les témoignages de réfugiés qui avaient survécu au bombardement. A Toronto, à New York ou à Buenos Aires, la presse a raconté l'apocalypse de Dresde. Un député travailliste a interpellé le gouvernement britannique au sujet du bien-fondé de