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Libération

Au Japon, le long calvaire des survivants de la bombe A

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Après les manifestations contre le révisionnisme nippon en Chine, l'hommage aux rescapés d'Hiroshima et Nagasaki permet à Tokyo de se poser en victime.
publié le 16 mai 2005 à 2h11

Tokyo de notre correspondant

C’est un ongle perdu. Noir et déformé. Celui d’un hibakusha, un «irradié», terme qui désigne au Japon les survivants d’Hiroshima et de Nagasaki (6 et 9 août 1945). En ouverture de la conférence sur le Traité de non-prolifération nucléaire (TNP), qui se déroule durant tout le mois de mai au siège de l’ONU à New York, le maire d’Hiroshima, Tadatoshi Akiba, l’a brandi en exemple. «Cet ongle est un symbole de la souffrance cruelle, sans merci et sans fin que les hibakusha ont enduré depuis soixante ans» a-t-il dit, avant de lancer un appel à l’élimination de toutes les armes nucléaires d’ici à 2020.

Mais il y a malaise sur l’ongle. L’hommage systématique aux hibakusha permet aussi au Japon, depuis des décennies, de se voiler la face et d’être moins regardants sur les crimes commis par ses troupes en Asie dans les années 1930 et 1940. En 1945, la fin de la guerre a en effet inversé les rôles. D’agresseur, le Japon est devenu agressé. Trois cent mille Japonais ont été tués par les deux bombes atomiques, si l’on compte les décès après guerre dûs aux effets de la radioactivité.

«Souffrance cruelle». La Chine, de son côté, rappelle qu’autant de civils chinois ont été tués par l’armée d’Hirohito durant le sac de Nankin en 1937... Chassé-croisé hasardeux, l’actuel hommage aux hibakusha survient peu après la fin des manifestations antijaponaises en Chine, provoquées par la réédition au Japon d’un manuel scolaire révisionniste. Malgré tout, quand il cite la «sou