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Libération
Reportage

L'Albanie entre misère et corruption

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Gangréné par les mafias, souvent liées au pouvoir, le pays le plus pauvre d'Europe vote dimanche.
publié le 2 juillet 2005 à 2h50

Tirana envoyé spécial

Les habitants de la capitale albanaise l'appellent toujours le blloku (le bloc). Jadis, ils n'évoquaient qu'à mi-voix cette «cité interdite» de résidences cossues au coeur de Tirana où vivait la haute nomenklatura de ce qui fut le plus dogmatique régime communiste européen. «Même après, les gens étaient tétanisés et évitaient le quartier, mais maintenant c'est là où tout se passe», assure Artes, étudiante attablée à la discothèque Black Stone, installée dans les jardins de la villa du défunt Enver Hoxha, implacable maître du pays des Aigles pendant quarante ans. Un centre Lincoln pour l'enseignement de l'anglais et de l'informatique occupe une aile du bâtiment. Depuis cinq ans, de luxueuses tours de verre et d'acier ou de grands immeubles bariolés remplacent les villas. Le prix du mètre carré double chaque année. De gros 4x4 ou des Mercedes flambant neufs bloquent les rues. Hommes et femmes portent des fringues italiennes à la dernière mode. Les nouveaux riches affichent leur opulence. Mais en Albanie mieux vaut ne pas s'interroger sur son origine.

«Economie noire». «Le boom économique se construit avant tout sur l'argent sale», accuse Kreshnik Spahiu, ancien juge devenu avocat et animateur du CAO (Citizen's Advocacy Office), une association spécialisée dans la dénonciation de la corruption. Les activités illégales ou parallèles représenteraient au moins 38 % de l'économie, selon l'OCDE, mais nombre d'experts estiment le pourcentage encore plus important.