John Garang n'aura pas goûté longtemps aux fruits d'une paix chèrement acquise. Même pas un mois d'état de grâce, et une mort, aussi brutale qu'inattendue, samedi, dans la chute de l'hélicoptère qui le ramenait d'Ouganda. Le 8 juillet, le chef rebelle, symbole du Sud-Soudan africain chrétien et animiste, avait effectué un retour triomphal dans la capitale du Soudan. Au terme de vingt-deux ans d'une terrible guerre civile contre le régime arabo-musulman de Khartoum qui, selon les estimations, a fait 1,5 million de morts.
Face aux centaines de milliers de sudistes de la capitale venus fêter leur héros, mais aussi des nordistes qui espéraient un vent nouveau de démocratie, Garang n'avait alors même pas pu achever son discours, couvert par les clameurs de la foule en transe. Le lendemain, il était intronisé premier vice-président du Soudan. Dans le même temps entrait en vigueur une Constitution transitoire garantissant au sud du pays son autoadministration pendant six ans, jusqu'à la tenue d'un référendum d'autodétermination.
Manne pétrolière. C'est tout cet édifice que risque de mettre à bas la mort de John Garang. «Le pire scénario imaginable vient de se produire», se désolait hier un diplomate européen. Garang était le pivot de l'accord de paix de Nairobi signé le 9 janvier 2005 et entré en vigueur six mois plus tard. Président du Sud et fort de la moitié de la manne pétrolière (300 000 barils par jour), il était censé reconstruire un territoire ramené à l'âge de pierre par la