Kfar Darom envoyé spécial
C'était supposé être le bastion des irréductibles, opposés à l'évacuation des colonies de Gaza. «Kfar Darom ne tombera pas une seconde fois», selon le slogan favori des colons de cette implantation déjà évacuée en 1948 devant l'avance des Egyptiens. Kfar Darom est tombé hier soir, livrant un dernier baroud d'honneur.
Les forces de l'ordre sont considérables. «Les filles, buvez de l'eau», recommande une capitaine à ses subordonnées. Quatre par quatre, elles doivent pénétrer et s'emparer des femmes ou des enfants barricadés dans la synagogue. Les policiers font de même pour les hommes. Une femme est emportée avec son bébé sur le ventre. Un colonel conduit par la main un enfant vers le bus qui l'emporte vers Beer Sheva. Comme une litanie, l'invective revient dans toutes les bouches. «Criminels de guerre», lance un adolescent. «Mon frère, c'est ça ta fierté de l'uniforme ?»
La plupart des expulsés choisissent la technique du «sac de pommes de terre» : se laisser traîner pour ne pas aller dans les bus. «Vous n'avez pas de coeur», lance Victa, en ramassant un peu de sable de Kfar Darom qu'elle emporte dans un sac. Maison par maison, les équipes frappent à la porte : «Encore cinq minutes, nous prions.» «Entrez sans casque», ordonne un officier à ses hommes. Toute la famille Kavmol est assise à terre comme lors du rite des sept jours de deuil, serrés les uns contre les autres ; le père agrippe contre lui son châle de prière et un chandelier. «Les pauvres», mur